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→ Définition : 

La censure est le contrôle exercé par le pouvoir politique ou religieux sur les ouvrages, les spectacles, et les manifestations culturelles ou sociales. Elle agit donc sur la liberté d’expression.

Un représentant du pouvoir examine l’œuvre avant de permettre sa diffusion au sein de la population. 

Définition & Histoire

Il existe différentes formes d'atteintes à la liberté

d'expression, avant et/ou après la diffusion de l’œuvre : 

 

  • La première forme est la censure indirecte, elle est exercée sous forme de pression, en particulier sous forme de censure économique (à cause, par exemple, de la concentration des médias)

 

  • La seconde forme est la censure institutionnelle ou sociale. C'est la privation de l'information disponible à un groupe. Cette forme de censure se justifie dans certains cas pour des raisons médicales (psychiatrie), mais elle est majoritairement négative. La censure positive peut prendre aussi la forme de censure liée à l'âge, par exemple, la classification de films par thèmes (violence, pornographie...)

 

  • La troisième forme sont les phénomènes d'autocensure, c'est-à-dire la censure de l’œuvre par son auteur.

 

Depuis longtemps, la censure est représentée sous forme d'une vieille femme peu sympathique, doté d'énorme ciseaux. Cette femme a finalement été nommé Anastasie.

                                                                               

 

 

Dessin d'André Gill de 1874, représentant Madame Anastasie

→ Histoire : 

  • Naissance dans l'Antiquité

Le terme «censure» est lié aux censeurs. Cette fonction était exercée à Rome vers 440 avant J.-C. Le but des censeurs était de conserver les mœurs et de recenser la population.

Les premières manifestations visibles de la censure se trouvent marquées dans la pierre de certains monuments antiques.

Les premières victimes connues de la censure sont grecques. Il s'agit des philosophes Anaxagore et Protagoras, accusés de scepticisme religieux.

 

On ne connaît pas la sanction du premier, mais le second fut chassé d’Athènes et tous ses livres furent brûlés. Socrate fut également jugé et condamné à boire la ciguë pour avoir tenté de corrompre la jeunesse, ses incitations à une libre réflexion gênaient le pouvoir en place.

D'autres philosophes et poètes furent également condamné pour des motifs à peu près identiques, même si ils ne connurent pas tous le même sort, on peut citer l'exemple de Théodore l'Athée et de Théophraste.

 

A Rome, durant la République romaine, la tolérance était plus grande. Si une censure théâtrale existait, peu furent inquiétés, excepté Ovide qui fut exilé par Auguste pour cause de pornographie.

  • Les débuts de la censure religieuse

Après la victoire du pont Milvius en 312, l’empereur Constantin se convertit au christianisme et la religion chrétienne devient religion d’État. Alors, une censure religieuse apparaît et lutte contre l'hérésie et l’impiété. Les haruspices* sont interdits dès 318.

 

A cette même époque est prononcée la première condamnation d'une hérésie, l'arianisme*, lors du concile de Nicée en 325. Puis la papauté prend le relais, notamment avec le pape Anastase Ier qui condamne les récits d’Origène et fait brûler ses livres.

 

C'est cependant à partir du XIIème siècle que se développe une politique de contrôle des opinions, d'interdiction des écrits hérétiques et de poursuite de ceux qui les professent ou les écrivent. 

 

Plus tard, des mécanismes de contrôle et de sanctions plus organisés, comme l'Inquisition en 1180, sont mis en place.

Destruction de livres (autodafé) condamnés par l'Inquisition vers 1180

  • L' «Ancien Régime»

Grâce à l'imprimerie, les idées nouvelles peuvent êtres diffusées plus rapidement et à un plus grand nombre. Un mouvement plein de hardiesse, d'impertinence se développe durant la Renaissance, d'abord au sein de l’Église puis s'affranchissant de plus en plus des dogmes officiels.

La contestation du principe d’autorité est doublée d'une volonté de libre recherche fondée sur la raison qui bouleverse une vision du monde imposée par l'autorité religieuse. Plus immédiat, le danger de la remise en cause du pouvoir social de l’Église, avec la Réforme engagée par Luther. Une littérature populaire, des pamphlets et des libelles politiques s'ajoutent aux ouvrages religieux et philosophiques. Le mouvement s'amplifie, particulièrement au siècle des Lumières, malgré la rigueur des contrôles et la sévérité des sanctions.

 

 

Les pouvoirs royaux et religieux réagissent rapidement en interdisant la

diffusion des ouvrages au contenu suspect, voire en réduisant au silence

leurs écrivains ou ceux qui les propagent. La papauté impose, dès 1501, 

aux imprimeurs de soumettre les livres, avant publication, au contrôle

d’évêques afin d'en «exterminer les ténèbres de l'erreur». Ce système sera

complété par l'institution de L’Index des livres prohibés

 

 

En France, le roi confie à la Sorbonne et au Parlement le soin de dénoncer

et juger les écris critiquables. Les écrits de Luther ainsi que ceux de Calvin

sont condamnés puis brûlés. Pantagruel de Rabelais est condamné et mis

à L'Index. Un système de contrôle se met en place et l'irrespect est

sévèrement puni. La contrainte devient de plus en plus dure : il faut

obtenir un privilège pour pouvoir imprimer.

 

Une véritable police du livre se met en place sous les règnes de Louis XIV

et Louis XV, visant les écrits, les auteurs et même les personnes dont le

comportement et les opinions vont à l'encontre des interdits formulés, les

sanctions pouvant aller jusqu'à la mortNombreuses sont les victimes de cette intolérance : Érasme, Galilée, Giordano Bruno, Michel Servet..

 

Cependant, la censure ou les exécutions n’empêchent pas la montée des revendications pour la liberté d'expression ; des écrits circulent, notamment contre Mazarin durant la Fronde. Certains pays ou villes comme l'Angleterre, les Pays-Bas ou Genève offrent aux intellectuels pourchassés un refuge et la possibilité d'imprimer. A partir du XVIIème siècle, la contestation s'amplifie, notamment avec Voltaire, Diderot et Beaumarchais, et la diffusion des livres interdits se développe.

Portrait d'Erasme, peint par Quentin Metsys en 1517

  • La Révolution Française

Le combat de Voltaire, Diderot et Beaumarchais, entres autres, pour la liberté de la presse et la diffusion des opinions aboutit à l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen.

 

« La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »

 

La presse connaît alors, de 1789 à 1792, l'une des périodes les plus créatives de son histoire. De nouvelles formes d'expressions apparaissent : affiches, caricatures, chansons.., tandis qu'explosent les moyens traditionnels de communication. Le 21 août 1791, un décret institue la liberté d'exposition pour tous les artistes français ou étrangers. A partir du 10 août 1792, les écrits contre-révolutionnaires et leurs éditeurs sont soumis au contrôle du comité de surveillance de la Commune.

 

La Convention rétablit la censure le 29 mars 1793 en décrétant « quiconque sera convaincu d'avoir composé ou imprimé des ouvrages ou écrits qui provoquent la dissolution de la représentation nationale, le rétablissement de la royauté ou toute autre forme de pouvoir attentatoire à la liberté du peuple, sera traduit au tribunal extraordinaire et puni de mort ». La loi des suspects du 17 septembre 1793 et le décret du 4 décembre 1793 renforcent ce système répressif.

 

Un certains nombre d'écrivains et journalistes furent alors conduits à l'échafaud. Après la chute de Robespierre, le Directoire rétablit la liberté d'expression mais la presse d'opposition, royaliste continue d'être l'objet de mesures de contraintes. 

  • De la fin du Premier Empire à la Troisième République

La fin du Premier Empire ne conduit pas au retour à une pleine liberté d'expression. La censure disparaît dans un premier temps mais une série de lois viennent limiter cette liberté. L'obligation pour les imprimeurs et libraires de disposer d'un brevet est ainsi maintenue. La loi du 17 mai 1819 permet de traduire en justice « tout outrage à la morale publique et religieuse ou aux bonnes mœurs ».

 

A partir de 1822, la répression se renforce. La IIème République tentera de revenir à un régime de liberté avant que le Second Empire ne rétablisse un régime proche de celui pratiqué sous l'Ancien Régime. Ces constants retour en arrière ne réduisent pas au silence les voix de la liberté : la caricature, les chansons, les pamphlets et ouvrages de combat politiques dénonçant le recul de la liberté se multiplient, édités à l'étranger, principalement à Bruxelles. Une littérature érotique voire pornographique vient défier les pouvoirs, les censeurs et l’Église catholique qui est repliée dans une posture contre-révolutionnaire.

 

La justice sanctionne ceux qui enfreignent les limites posées par une législation sévère et changeante. La volonté de veiller à la santé morale du peuple se confond souvent avec le souci de faire taire l'opposition politique ou l'irrespect religieux. Sous le Second Empire, comparaissent devant le tribunal pour « délits d'outrages à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs », Flaubert pour Madame Bovary, Baudelaire pour Les Fleurs du Mal et Eugène Sue pour Les Mystères du peuple.

 

La loi de 1881, un des textes les plus libéraux sur la liberté de la presse, permet de renouer avec les principes exposés dans l'article 11 de la DDHC. La liberté de publication et de diffusion est posée comme un absolu. Les délits de presse sont strictement définis : incitation à des crimes ou des délits, appel des militaires à la désobéissance, diffamation de chefs d’États étrangers et offense au Président de la République. La loi souhaite, au travers de la répression du délit de diffamation, protéger les particuliers.

  • Le XXème siècle

Après le règne sans partage de l'écrit, le paysage va changer en quelques décennies. La radio est d'abord inventée. Les pouvoirs publics vont très vite chercher à la contrôler, voire parfois à la transformer en outil de propagande. Elle sert aussi de support à des organisations de résistance ou de libération, comme la BBC durant la Seconde Guerre Mondiale.

 

Puis la télévision fait son apparition, considérée comme suffisamment importante pour que lors des coups d’État ou des révolutions, sa conquête soit l'objectif premier des insurgés. Parallèlement, le cinéma permet l'essor d'un nouveau support culturel de masse.

Dans les années 1980 naît Internet, un outil de dimension planétaire.

 

L'extraordinaire pouvoir d’influence des ces nouveaux médias entraîne immédiatement la volonté d'en assurer le contrôle, d’abord par l’État dans les régimes autoritaires mais aussi dans les démocraties. Ceci va de pair avec une tentation de censurer les messages des médias audiovisuels.

 

Le XXème siècle reste dans l'Histoire comme le siècle des totalitarismes. Les régimes communistes, nazis, les génocides, outre leur horreur, se sont attachés à réduire au silence toute forme d'opposition et de contestation. Goebbels, ministre de la propagande hitlérienne, en est resté une figure emblématique. Le régime de Vichy, le fascisme en Italie, le franquisme en Espagne firent de la censure et du contrôle des médias une arme de mise au pas des esprits et de réduction au silence des opposants.

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